L’internat est célèbre pour son concept pédagogique de “capitaineries”.
De façon générale, les élèves sont incités à prendre des responsabilités, qui augmentent avec le niveau de classe ; ces tâches peuvent être des responsabilités à l’internat ou à la bibliothèque, jusqu’au « capitanat », pour les élèves plus âgés, qui deviennent responsables d’une équipe de plus jeunes élèves. Ils doivent alors servir de modèles et transmettre les valeurs des Roches. Les capitaines, âgés au minimum de 14 ans, sont choisis par les élèves et leur investiture doit être confirmée par les enseignants. Quatre ou cinq capitaines sont nommés dans les maisons qui comptent 40 ou 50 élèves, soit un capitaine par dortoir. Ils surveillent notamment l’étude du soir.
André Charlier arrive en 1940 à l’École des Roches dont il prend la direction en 1941. C’est avant la rentrée de 1942 qu’il rédige pour les élèves “capitaines”.
À travers une série de lettres empreintes de rigueur et de passion, il défend une vision exigeante de l’éducation, fondée sur l’autorité, la transmission du savoir et la formation du caractère.
Charlier insiste sur leur responsabilité : ils ne doivent pas seulement instruire, mais aussi forger des âmes fortes et libres. Il met en garde contre la facilité et la médiocrité, prône une discipline exigeante, alliant fermeté et bienveillance, pour éveiller chez l’élève le sens du devoir et du dépassement de soi.
L’ouvrage met aussi en avant l’importance de la culture et de la tradition comme fondements essentiels de l’éducation. Charlier voit dans les grandes œuvres et les figures historiques des modèles à suivre, des repères pour orienter la jeunesse.
À travers ces lettres, il exhorte les capitaines à devenir des maîtres au sens noble du terme : des guides inspirants, capables de transmettre un idéal et d’incarner eux-mêmes les valeurs qu’ils enseignent.
« Par le rôle que vous jouez dans la maison, quand vous voulez vous y donner, vous entrez déjà dans la vie, c’est-à-dire : vous êtes en contact avec les réalités, ce qui n’est pas le cas de la plupart des garçons de votre âge. Vous vous sentez comptables de vos gestes, parce que vous savez qu’on vous regarde et qu’on vous juge, et vous commencez à soupçonner l’influence qu’un homme peut exercer par ce qu’il est, vous avez à prendre des responsabilités et des initiatives. Vous regardez agir vos camarades, vous essayer de les aider ou de les redresser, vous recevez parfois des confidences, par là vous pénétrez un peu dans le domaine secret des âmes. Ainsi vous prenez le goût de l’action, vous avez le sentiment de faire votre apprentissage d’homme.»